les balades à vélo de Pierrot
le 21 décembre,
c'est l'hiver !
Depuis déjà quelques jours, les très fortes chaleurs se sont emparées de la France qui transpire à grosses gouttes en ce début juillet. Mais je ne vais quand même pas passer le début de mes vacances cloitré dans l’appartement alors je me décide à partir quelques jours pour le Jura et ses hauts plateaux, en espérant y trouver un peu de fraîcheur. Le choix de la destination n’est pas le fruit du hasard. Durant l’hiver, saison propice à l’examen des cartes et à la préparation des balades, j’ai longuement travaillé sur quelques parcours qui m’emmèneraient redécouvrir cette superbe région que j’avais traversée il y a déjà quelques années avec quelques copains lors de notre périple autour du massif du Jura franco-suisse. Au final, quatre parcours et leurs roadbooks sont fins prêts pour le GPS.
Durant le voyage en voiture entre Mende et le département du Jura, la canicule se fait encore sentir, surtout au niveau de l’agglomération lyonnaise où la température frôle les 34 ° ! L’arrivé en fin d’après-midi dans le village de Longcochon me plonge très vite dans l’atmosphère de la campagne jurassienne, avec ses prairies et ses fermes franc-comtoises massives. La récolte du foin bas son plein avant les orages annoncés pour la soirée et qui tardent à venir.
Le repas du soir donne le ton de ces vacances qui seront gourmandes : salade de choux rouge au jambon et Comté, suivi d’une escalope de dinde franc-comtoise servie avec des carottes et du riz puis, en dessert, une délicieuse poire Belle Hélène. A l’auberge du Sillet, pas de carte avec une interminable liste de plats mais une cuisine vraiment faite «maison» avec un menu unique et copieux. Un vrai régal…
Ici, c’est le royaume du Comté alors, même aux heures tardives, le service de collecte du lait passe toujours de villages en villages.
Au programme du lendemain, j’ai prévu la route des Sapins si le temps le permet car le ciel est de plus en plus menaçant. J’espère que la nuit sera fraîche pour récupérer un peu des nuits précédentes beaucoup trop suffocantes.
Les orages sont passés dans la nuit sans lâcher la moindre goutte de pluie et le matin, le temps est déjà chaud et humide dès le réveil. Après le petit-déjeuner avec du Comté évidemment, je récupère mon pique-nique à la cuisine de l’auberge. Le temps de vérifier que je n’ai rien oublié et surtout pas suffisamment d’eau pour cette balade sur la journée et je suis prêt à partir à la découverte de la route des Sapins et de la forêt de Joux.
Vers 8h45, ce sont les premiers tours de roue en direction du village médiéval de Nozeroy et de sa très belle tour de l'Horloge par une descente assez dangereuse en raison de très nombreux trous dans la chaussée et de portions complètement détruites qui imposent une grande prudence. Jusqu’à Onglières, je roule à travers des paysages de prairies puis, assez vite, la route se rapproche du massif forestier de la Joux dans une succession de courtes montées et descentes telles des montagnes russes ! Deux kilomètres après le village de Mourmans, je quitte la route départementale en bifurquant sur la droite pour rejoindre la route des Sapins, comme me l’indique le panneau touristique en bordure de route.
Me voici parti pour une quarantaine de kilomètres sur de petites routes forestières. Le ton est donné dès le début : le revêtement est mauvais, mais cela s’arrangera par la suite, et la pente est assez forte ; même si des pentes encore plus élevées (11 ou 12 %) m’attendent plus loin aussi bien en montée qu’en descente mais cela je ne le sais pas encore… Malgré tout, cette route, quasiment sans voiture et à l'étroite chaussée à l’ombre bien agréable des grands sapins qui procurent une certaine fraîcheur salvatrice, est un vrai bonheur pour les cyclistes.
Même sans GPS ou sans carte, l’itinéraire est facile à suivre ; il suffit de se laisser guider par les petits lutins sur les panneaux qui jalonnent la route. Le tout premier tronçon sur chemin vient assez vite pour découvrir le belvédère du Signal. Ce chemin est en bon état et assez court (une centaine de mètres seulement) alors je n’hésite pas à m’y engager et je ne le regrette pas : la vue sur la vallée des Nans est très belle. Par la suite, la route des Sapins rejoint le village de Chapois par une longue descente qui ramène dans la vallée de l’Angillon et ses prairies de fauche avant, très vite, de reprendre la direction de la forêt via une joli petite côte à 11 % sur 1 km. Le compteur indique presque trente kilomètres lorsque j’arrive au carrefour de la RD 107, à la Porte de la Marine.
Les Sapins de la Glacière ne sont plus loin... Pour les découvrir, il faut emprunter un étroit chemin de découverte aménagé dans la réserve biologique de la Joux. J’hésite un peu mais il semble praticable à vélo alors je me lance à sa découverte. Après quelques centaines de mètre, j’arrive au pied de ces grands sapins. Je poursuis sur le chemin de découverte mais j’aurais été bien avisé de faire demi-tour. Il rétrécit au fur et à mesure pour n’être plus qu’un étroit sentier qui serpente entre les grands arbres et les baumes, ces cavités creusées dans le calcaire et dans lesquelles la neige s’accumule pour y rester parfois jusqu’à l’été sous forme de glace (d’où le nom de glacière).
Par endroit, il me faut même porter le vélo en raison d’arbres tombés au sol ou d’un trop grand nombre de blocs rocheux ; ce qui n’est pas facile vu le poids du vélo chargé avec la sacoche de guidon et la sacoche arrière ! Malgré cela, me voici revenu sur le chemin emprunté au départ et je peux enfin remonter sur le vélo pour rejoindre la route des Sapins.
A la maison forestière du Chevreuil, je cherche un point d’eau pour me ravitailler mais rien, pas la moindre source, pas le moindre robinet en vue. A ma grande surprise, j’y découvre une stèle érigée en 2018 en mémoire des 3 000 soldats bûcherons du «Canadian Forestry Corp» qui exploitèrent, de janvier 1917 à mars 1919, les ressources du massif jurassien de la Joux, afin de fournir le bois nécessaire à la construction des tranchées et au remplacement des traverses de chemin de fer. Je reprends donc ma route pour arriver enfin, 5 km plus loin, au majestueux Sapin Président de la Joux. Elu le 17 juin 1964 par les forestiers, cet arbre mesure plus de 45 m de haut pour une circonférence de 4,45 m (à 1,30 m du sol) selon les dernières mesures. Magnifique, n’est-ce pas ?
Au gré de mon cheminement, au-delà des superbes sapins de la forêt de la Joux, je découvre aussi quelques écrits d’auteurs ou de poètes comme ce texte de Jacques Prévert inscrit sur un banc au pied du Sapin Président : «Quand un enfant de femme et d’homme adresse la parole à un arbre, l’arbre répond, l’enfant l’entend. Plus tard, l’enfant parle arboriculture avec ses maîtres et ses parents. Il n’entend plus la voix des arbres, il n’entend plus leur chanson dans le vent.».
Un peu plus loin je m’arrêté au belvédère de la Roche situé à quelques dizaines de mètres en contre-bas de la route pour profiter du panorama sur le vallon de Villers sous Chalamont avant de poursuivre vers la forêt domaniale de Levier, toujours sur la route des Sapins. Jusqu’à la RD 72, les grands sapins ont laissé place à de jeunes plantations et l’ombre fraîche à un soleil de plomb. Il va falloir trouver un point d’eau pour remplir les bidons mais les quelques fontaines que je croise sur ma route dans les villages sont toutes asséchées… A l’approche du village de Levier, me voici arrivé au terminus : c’est à ce carrefour avec la RD 9 que s’arrête la route des Sapins.
Je commence donc le retour vers Longcochon par la route forestière de Bellecombe qui s’avère être à l’abandon. Au vu de la carte, je m’attendais à un grand chemin forestier mais ce n’est pas le cas. Le revêtement, qui n’est manifestement plus entretenu depuis de nombreuses années, se délite partout ce qui m’oblige à zigzaguer dans tous les sens pour éviter les plus gros trous ou les plus gros cailloux. Le vélo est pas mal secoué tout comme moi ! Par chance, ce tronçon fortement dégradé ne fait qu’un peu plus d’un kilomètre avant de tourner sur la droite sur le chemin bien plus carrossable qui m’emmène dans Levier à travers les prairies de fauches qui cernent le village. Je commence à ressentir la faim (il est un peu plus de 13h15 quand même !) mais le profil de la balade m’incite à poursuivre mon chemin encore quelque temps. Passé la ferme de Lauteret, la route s’élève à nouveau pour gagner les crêts de la forêt de Maublin. Je quitte la RD 9 pour rallier la route forestière de Super Maublin, qui est en fait un grand chemin sur plsu de 3,5 km, et atteindre le col de Chalamont qui culmine à 867 m d’altitude ! Maintenant, j’ai vraiment faim, il est temps de se trouver un coin sympa pour le pique-nique, si possible à l’ombre et avec un peu d’air pour se rafraîchir.
C’est chose faite en arrivant à la chapelle Notre-Dame des Champs. Par temps clair, le Mont Rose et le Mont Blanc doivent être visibles selon le panneau d’information mais, aujourd’hui, aves les brumes de chaleur, j’en doute beaucoup. Seuls les hauts sommets des crêts (Mont d’Or, mont Suchet, etc) à la frontière franco-suisse le sont. Pendant que je me restaure, les agriculteurs s’affairent au ramassage des balles de foin avant les orages attendus comme souvent en fin de journée. Une heure plus tard, je reprends ma route vers 15h00. Dans la traversée du vallon de Boujailles, point d’ombre pour s’abriter d’un soleil cuisant difficile à supporter et toujours pas de fontaine pour se rafraîchir…
Mais le parcours que j’ai tracé me ramène vite en forêt via la route forestière du Jura vert. Me voici enfin sous une l’ombre bienfaisante qui me procure une certaine fraîcheur très agréable. En plus, ces étroites routes forestières sont peu fréquentées par les automobilistes alors il y règne un grand calme et une certaine sérénité. Au bois de la Lave, un sentier de découverte permet de découvrir le Fiouve Président et un épicéa géant mais j’y renonce car de récents débardages l’ont bien dégradé et il est très difficile d’y pousser le vélo. Plus loin, au bout de la route forestière de la Basse Joux, une fois arrivé au carrefour du Litige, je quitte ce superbe massif forestier pour retrouver les paysages champêtres au hameau de Plénisette. Une belle descente dans la vallée de l’Houle me permet de rejoindre le village de Mièges.
Malheureusement, aucune fontaine ou aucun troquet à l’horizon alors je bois les dernières gouttes d’eau de mes bidons. Me voici maintenant complètement à sec. Il ne reste plus que 3 km à parcourir jusqu’à l’auberge du Sillet mais tout en montée… Pour me donner du courage, il me suffit de penser à la bouteille d’eau que j’ai mise au réfrigérateur ce matin et qui m'attend bien fraîche !
Une fois arrivé, je la siffle en quelques minutes assis à la table de pique-nique, à l’ombre du tilleul. Après s’être reposé, c’est l’heure de la douche puis, un peu plus tard, celle du dîner. Au menu, fondue jurassienne ou salade du pays. Avec la chaleur, ça sera pour moi la salade gourmande. Avant l’aller me coucher, je mets deux bouteilles d’eau au frais pour le lendemain et prépare la prochaine balade sans oublier de recharger le GPS, indispensable pour s’orienter facilement parmi toutes ces petites routes forestières et ces chemins.
La nuit a été agréable avec une température plus fraîche que les jours précédents. C’est la première fois depuis le début de la canicule et ça fait beaucoup de bien ; on dort tellement mieux ! Au programme de la journée figurent les hauts plateaux du Jura avec une courte incursion chez nos voisins helvètes. En attendant l’heure du petit-déjeuner à 8h00 (c’est à cette heure qu’arrive le pain), je peaufine les préparatifs et vérifie que j’ai bien ma carte d’identité et autres papiers pouvant être utiles en Suisse.
Comme la veille, le départ est donné vers 8h45. Le démarrage se fait en descente vers le vallon de la Settière mais très vite, la route s’élève et c’est la première suée dans une atmosphère pesante en raison de l’humidité ambiante et de l’absence totale de vent pour rejoindre la route de La Latette. C’est ensuite un très long faux plat montant jusqu’au village d’Arsure-Arsurette où je tourne sur la gauche sur le chemin de la Vie du Bois qui m’amène au pied de la forêt du Prince. Cette portion est bien agréable car beaucoup plus fraîche mais cette sensation n’est que de courte durée. Arrivé à la route forestière, il me faut virer sur la droite dans une courbe où la pente est forte, vraiment très forte ! Je dois mettre tout à gauche pendant quelques centaines de mètres avant de pourvoir souffler un peu. Après quoi, le jeu des montagnes russes reprend : sur une dizaine de kilomètres, je monte et je descends au gré du profil tourmenté de la route forestière de l’Alliance qui serpente dans la forêt de la Haute Joux. Comme la veille, je ne croise personne, avec cette impression très agréable d’être un peu seul au monde. Tout doucement, l’altitude augmente et me voici maintenant sur la ligne de crête à près de 1 100 m.
En basculant dans le vallon du ruisseau d’entre Côtes, je rentre dans le parc naturel régional du haut Jura par un chemin que je suis sur 1 700 m pour atteindre le col du Bulay (1 100 m). J’y fais une courte halte pour me désaltérer ; le premier bidon est déjà vide après seulement 24 kilomètres ! Pour gagner Foncine le Haut, le chemin laisse place à une route au revêtement bien meilleur. Et c’est tant mieux car trois ou quatre épingles m’attendent dans la descente pentue jusqu’au village. Par chance, sur la place centrale du village, la fontaine coule très généreusement et ses eaux fraîches sont les bienvenues pour remplir le bidon, y tremper le casque et les gants et boire un coup évidemment !
Maintenant, il me faut traverser la forêt du mont Noir en direction de La Chapelle des Bois. A la sortie de Foncine, la route s’élève à travers les pâturages avant de laisser place à un grand chemin très roulant. Désormais, mon parcours suit le GR 509 - l’Echappée Jurassienne - la Grande Traversée du Jura jusqu’à la ferme de Norbière mais je n’y croise aucun randonneur ou VTT en balade, seulement quelques troupeaux de Montbéliardes qui paissent tranquillement dans ses magnifiques prairies fleuries des hauts plateaux. En arrivant au carrefour avec la RD 46, je laisse le village de La Chapelle des Bois sur ma gauche pour tourner en direction de Morbier.
Sur cette route, quelques véhicules circulent avec un trafic qui demeure très faible mais ça change quand même beaucoup des petites routes et des chemins empruntés auparavant. Au chalet des Mortes (c’est aussi le nom porté par un hameau, un lieu-dit, un ruisseau et un lac !), je bifurque sur la gauche sur une route étroite et déserte ; ce qui n’est pas surprenant car elle se termine en un chemin pas vraiment carrossable sur lequel passe le GR 509 au-dessus des lacs des Mortes et de Bellefontaine.
Le ciel, peu nuageux au départ, est désormais couvert et s’assombrit de plus en plus au fur et à mesure que je m’approche des sommets. Ce n’est pas bon signe car la météo a annoncé un risque d’orage en après-midi… Avant le village de Bellefontaine, je bifurque une nouvelle fois pour traverser la forêt du Risoux par les routes forestières des Ministres et du Crêt des Sauges, en direction des Rousses. Le menu est toujours le même dans cette balade qui m’emmène par monts et par vaux : une grimpette assez difficile pour rejoindre la forêt suivie de montagnes russes jusqu’à rejoindre le val suivant. C’est assez fatiguant mais les paysages forestiers que je découvre sont superbes et j'y roule toujours dans un calme quasi absolu, seulement dérangé par quelques rares voitures. On est ici au cœur du domaine skiable des activités nordiques de ski de fond et de raquettes, comme l’atteste les nombreux panneaux signalétiques présents à tous les carrefours.
Comme pour annoncer de proches désagréments, le ciel s’est encore assombri et laisse échapper les premières gouttes. Pour l’instant, cette légère pluie est rafraichissante sans être gênante mais, dans la descente sur Les Rousses, l’orage éclate sur les sommets vers la Dôle. Avant le départ, j’avais envisagé de m’arrêter à cet endroit pour le pique-nique sur les rives du lac des Rousses, étant presque à mi-parcours mais le mauvais temps m’incite à poursuivre ma route vers la frontière suisse ce qui devrait me permettre de m’éloigner de l’orage. Mais celui-ci se développe de plus en plus pour gagner la vallée de l’Orbe derrière moi, au fur et à mesure que je m’approche de Bois d’Amont à la frontière. C’est une course poursuite qui s’engage entre lui et moi. Je m’arrête après avoir passé le poste de douane suisse de Carroz, pensant pouvoir enfin faire la pause méridienne mais il suffit de me retourner pour me persuader de continuer ma route sur un rythme plus soutenu qu’à l’habitude.
Ce n’est qu’une fois parvenu à la gare de Brassus vers 14h00, alors que le compteur indique déjà 76 km, que la faim l’emporte sur la crainte de l’orage. Mais la pause est de courte durée (une vingtaine de minute seulement) car les nuages noirs très menaçants gagnent tous les sommets qui entourent la vallée de Joux. A la reprise, mon itinéraire m’emmène sur la petite route qui longe la rive ouest du lac de Joux. C’est dommage que le temps soit si mauvais car les berges du lac semblent paisibles et propices à la flânerie… Alors que je m’approche de Le Lieu, une belle surprise m’attend aux Esserts de Rive au niveau de la voie ferrée. Pour quitter la rive du lac et rejoindre le village, il faut franchir une ligne de crête par une rude montée à 13 %. L’effort est intense mais assez court alors ça passe quand même sans trop de difficulté !
Quelques kilomètres plus loin, une vieille connaissance fait son apparition : la Dent de Vaulion qui culmine à 1 483 m d’altitude. Nous étions passé à son pied lors de notre périple cyclotouriste autour du massif du Jura il y a déjà quelques années. Au hameau du Séchey, il me faut maintenant prendre la direction de Mouthe pour revenir en France via le col de Landoz-Neuve dont l’ascension est assez facile grâce à un revêtement de très bonne qualité et à une pente qui n’excède pas 5 % sauf dans le dernier kilomètre. Un peu avant le col, c’est le passage de la frontière marquée par un muret de pierre qui court dans les pâturages et les postes de douane suisse et français. En fait, ce ne sont que deux pauvres cabanes en bois que les douaniers ont dû abandonner depuis déjà de nombreuses années.
Là aussi, la pause est de courte durée car l’orage, qui semblait s’être éloigné, gronde à nouveau à seulement quelques kilomètres de moi. Jusqu’à présent, la chance m’accompagne et j’espère surtout qu'elle me sera fidèle. Arrivé au col de Landoz-Neuve, je fais un arrêt le temps de prendre quelques photos puis je reprend ma route. La route continue à s’élever pour passer au point culminant de cette randonnée à 1 270 m d’altitude avant d’attaquer la longue descente de 8 km sur Mouthe. Pour la dernière fois de la journée, je quitte la route principale pour prendre la route forestière qui traverse la forêt domaniale de Noirmont jusqu’à la vallée du Doubs.
Alors que je me laisse glisser doucement dans la descente sur Mouthe, quelques grosses gouttes de pluie commencent à tomber pour être de plus en plus nombreuses et donner une belle averse orageuse. Et pour mon plus grand plaisir, la grêle s’en mêle aussi ! C’est certain, la chance m’a quitté alors que je ne suis qu’à deux ou trois minutes du village où j’aurai probablement pu m’abriter… C’est vraiment dommage car je passe à côté de la spectaculaire source du Doubs qui jaillit d’une cavité au pied du mont Risoux mais je ne m’y arrête pas vu les circonstances. Je rejoins la place de l’église pour m’abriter sous le large porche de l’ancienne ferme de la Bouverie qui daterait de la fin du XVIe siècle. Certain d’y être à l’abri, j’en profite pour faire une pause et me restaurer en terminant l’un des casse-croûtes du pique-nique du midi tout en regardant l’orage qui stagne sur les sommets entre le mont d’Or et le mont Risoux, à seulement quelques kilomètres.
Il me faut continuer en direction du village des Pontets où les cieux semblent plus cléments en s’éloignant du haut Jura. Mais rien n’est jamais certain et dans la montée du dernier col de la journée, le col de Saint-Sorlin dans la forêt du Prince, le tonnerre gronde une nouvelle fois. Décidemment, l’orage ne cesse de me poursuivre depuis ce matin ! Je ne m’arrête pas au sommet du col et poursuit dans la descente vers Cerniébaud, où je quitte le parc naturel régional du haut Jura, en me retournant par moment pour constater que le mont Saint-Sorlin est maintenant au cœur de l’orage.
Ce n’est qu’après les villages de La Latette et d’Essavilly que je sais que la partie est gagnée et que l’orage ne me rattrapera plus alors qu’il ne me reste qu’une poignée de kilomètres pour retrouver l’auberge du Sillet ! Je peux enfin lever le pied et profiter pleinement des paysages. Après cette longue partie de manivelles faite en grande partie à rythme forcé, la fatigue se fait très vite sentir mais le délicieux gratin de pommes de terre accompagné de saucisse de Morteau servis au dîner et une bonne nuit de sommeil devraient me permettre de récupérer rapidement surtout que la fraicheur nocturne est enfin de retour.
L’objectif de cette journée est le circuit des lacs et j’ai un impératif (et oui, ça arrive même pendant les vacances) : être à midi à la cascade du Hérisson pour pique-niquer avec Vincent, un ancien collègue qui travaille désormais dans la région depuis plus d’un an maintenant.
Le départ se fait par Nozeroy puis par le village de Doye où m’attend une drôle de surprise. Au carrefour au centre du village, un gigantesque violon trône sur une remorque. Avec une longueur de plus de 6 m, une largeur de 2 m et un archer qui mesure plus de 7,5 m, c’est probablement celui de Gargantua.
Il fait déjà chaud mais l’air est moins humide que les jours précédents ce qui rend la chaleur plus supportable. Les petites routes que j’emprunte sont toujours aussi tranquilles et il n’y a qu’après le tunnel au-dessus de Sapois que la circulation se fait plus dense à l’approche de Champagnole. Je suis méticuleusement les consignes que me donne le GPS pour traverser la ville et rejoindre au nord-ouest de la ville la piste cyclable «la voie du Tacot» qui permet de rejoindre le lac de Chalain. Quelque peu à l’écart de la RD 5 très fréquentée qui relie Champagnole à Lons le Saunier, cette piste entre prairies et champs de céréales est un vrai régal. En plus l’enrobé presque tout neuf permet de rouler sans pédaler ; c’est en tout cas l’impression que j’ai au regard des routes forestières et des chemins pris ces deux derniers jours.
Une autre bonne surprise m’attend quelques dizaines de mètre après avoir franchi la rivière «l’Angillon», à la lisière de la forêt domaniale de La Faye de Montrond. Lors de la préparation du parcours, j’avais vu que la piste cyclable coupait cette route départementale ce qui pouvait s’avérer dangereux. Mais ça, c’était avant ! Avant les travaux de création d’un passage inférieur flambant neuf qui permet de poursuivre sa route en toute sécurité. Cet ouvrage est tellement récent que les travaux ne semblent pas encore tout à fait achevés. Toutes mes félicitations à l’aménageur !
La piste cyclable se poursuit sur la route forestière de l’Angillon avant de rejoindre Crotenay où elle se termine. Pour éviter de me retrouver sur la RD 5, je préfère continuer sur un chemin qui me mène directement au carrefour que j’avais repéré sur la carte pour rejoindre une route qui m’avait semblé tranquille. Ça, c’est sur le papier mais une fois sur place, c’est un vrai défilé de camions de chantier chargés de matériaux. Je n’avais pas vu qu’il y avait une très grande carrière dans le coin. Après quelques centaines de mètres passé dans la poussière des camions, je dépasse l’entrée de la carrière et me voici à nouveau dans le plus grand calme jusqu’au Pont du Navoy.
En passant sur le pont sur l’Ain, j’aperçois un groupe qui se préparent pour une balade à canoë. Je poursuis ma route vers le lac de Chalain par la RD 27 en plein soleil et avec beaucoup de trafic. Je n’ai pas vu que l’itinéraire de la voie du Tacot indiqué sur la carte des véloroutes et voies vertes de France passe par le village de Monet la Ville pour revenir sur la piste cyclable à Montigny sur l’Ain. C’est une belle erreur de ma part ! Tant pis pour moi, c’est ma punition sur près de 2 km… Par contre, j’ai bien prévu le petit détour par Marigny à la fin de la piste cyclable pour éviter la route principale. Me voici maintenant arrivé au lac de Chalain. Avec la canicule, les parkings sont déjà presque pleins même en milieu de semaine. Un nouveau tronçon de piste cyclable est balisé à partir de la base de loisir en direction de Doucier mais le revêtement laisse à désirer : ce semblant de piste est plutôt un simple chemin étroit non revêtu et plein de caillasses où seuls peuvent circuler les VTC ou les VTT. Pour les autres vélos, c’est obligatoirement la route principale et son flot de véhicules. C’est assez incompréhensible qu’aucun aménagement digne de ce nom ne soit encore construit dans ce site qui attire tant de touristes en été ! Il n’y a plus qu’à espérer qu’un projet soit dans les cartons d’une collectivité locale et non sous les pieds d’une armoire… Avec GBDN, j’y passe sans trop de problème avant de devoir reprendre la RD 27 car c’est ici que s’interrompt pour de bon la piste cyclable.
Dans la traversée du village de Doucier, le GPS m’indique de tourner sur ma gauche dans 100 m mais j’anticipe un peu trop et prend la direction de la base de loisir de Fontenu. Je me rends compte de cette erreur après avoir parcouru un peu moins d’un kilomètre. Le temps de faire demi-tour et je retrouve la bonne route : celle des cascades du Hérisson (c’est le nom de la rivière qui viendrait de «Yrisson», signifiant «eau sacrée ») qui longe les lacs glaciaires de Chambly, presque invisible car tellement bien caché derrière un épais rideau d’arbres, et du Val, aux eaux turquoise. Il est presque midi et j’attaque le dernier kilomètre avant d’atteindre le parking quand Vincent, parti à la pêche à la mouche sur l’Ain, me double en voiture. Le timing est parfait ! Après une première bière bien fraiche et sa petite sœur, on s’installe dans un coin bien ombragé en bordure du Hérisson pour pique-niquer, les pieds presque dans l’eau.
Avant de repartir, il est impossible de ne pas pousser jusqu’au belvédère sur la cascade de l’Eventail, 300 m plus haut sur le sentier. Avec une hauteur de 65 m, c’est la plus impressionnante de cet ensemble de 31 cascades, avec le Grand Saut (60 m). Même avec la sécheresse qui commence à se faire sentir en ce début d’été, le site est spectaculaire ! Il faudra que je revienne découvrir l’ensemble du site via le sentier pédestre.
C’est maintenant pour moi l’heure de se remettre en selle alors que Vincent retourne à la pêche. Le meilleur reste encore à venir avec encore 60 km à parcourir et plus de 1 000 m de dénivelée à gravir. La route des cascades du Hérisson étant sans issue, il me faut d’abord regagner Doucier jusqu’au carrefour avec la RD 39 pour continuer par une belle grimpette vers Songeson. En plein cagnard, la remise en route n’est pas facile mais je ne suis pas le seul à souffrir dans cette montée où je double un groupe de cyclos probablement en voyage itinérant au vu des lourdes sacoches sur les vélos. Au sommet de la côte, un air plus frais se fait sentir. Avec une fontaine aux eaux très fraîches à Ménétrux en Joux et l’ombre généreuse que procure la forêt, ça va déjà bien mieux.
La route surplombe maintenant les cascades du Hérisson jusqu’au hameau de La Fromagerie, l’un des principaux points de départ des sentiers de découverte de ce joyau naturel. Les voitures de touristes y sont très nombreuses même si officiellement les vacances scolaires ne sont pas encore commencées. Courage, plus que deux jours à patienter… Dans la traversée d’Illay, je quitte la route des cascades pour bifurquer sur ma gauche sur le chemin qui longe la rive du lac de la Motte dont les eaux turquoise sont étonnamment transparentes. J’en profite pour y faire une pause ravitaillement (il est presque 16h00, c’est bientôt l’heure du goûter) tout en admirant le Pic de l’Aigle qui dominent le lac. Ce coin très tranquille est aussi fréquenté par quelques personnes venues s’y baigner, pour certaines en famille. Ça donne envie… Les kilomètres suivants, la route offre une très belle vue sur le lac et les falaises rocheuses du Pic de l’Aigle jusqu’au Frasnois.
En tournant sur la RD 74, la route gagne de la hauteur pour atteindre le belvédère sur le lac de Narlay dont les eaux turquoise baignées de soleil contrastent fortement avec le ciel de plus en plus sombre. J’ai déjà vu ça hier ! Désormais, l’orage semble vraiment proche. On verra bien d’ici quelques kilomètres…
Après avoir passé le petit col, je quitte la route qui repart en direction du lac de Chalain et tourne sur ma droite pour emprunter la route forestière de la Grande Plaine. C’est la dernière pour cette journée afin d’éviter un grand détour de presque 10 km. Au début, le revêtement est bon dans cette partie en côte, mais progressivement, la route forestière se transforme en un grand chemin qui demeure au final assez roulant. Cette escapade sylvestre me permet ensuite de descendre sur la vallée de la Lemme à Pont de Chaux où m’attend la RN 5 ! Cette route est l’une des principales de la région pour aller en Suisse par le col de la Givrine ou le col de la Faucille alors le trafic y est particulièrement dense et même si on est en agglomération, cela ne semble pas facile de s’insérer dans le flot des véhicules. Lors de la préparation de ce parcours, j’ai longtemps étudié la carte pour trouver l’endroit où la couper le plus rapidement possible. A Champagnole, la question ne s’est pas posée car ma route passait au-dessus de la RN 5. Ici, ce n’est pas le cas mais ce n’est pas très grave car je l’emprunte seulement sur une centaine de mètres avant de tourner à droite en direction de la gare ferroviaire. Il me suffit de patienter quelques minutes et je profite d’un «trou» dans le trafic pour me lancer.
Me voici reparti sur de petites routes beaucoup plus calmes. Comme souvent dans la région, mon profil m’indique une pente moyenne modérée mais la réalité est toute autre : au hameau de Tépette, un raidillon très costaud m’attend sur 200 m environ avant d’arriver sur un plateau… Arrivé à Chaux des Crotenay, je m’arrête pour une pause ravitaillement. Je termine le casse-croûte au Comté, bois un bon coup et refais le niveau des bidons une dernière fois pour être certain de ne pas manquer d’eau comme cela a failli être le cas le premier jour. J’en profite aussi pour faire un point sur la carte. Il est un peu plus de 16h30 et le compteur affiche près de 90 km. Il m’en reste donc une trentaine à parcourir avec encore quelques belles côtes à franchir sans oublier une mauvaise surprise.
A la sortie du village, je dois prendre la route qui descend dans la vallée de la Saine en rive gauche mais un sinistre panneau m’indique sa fermeture à 3 km en raison d’un risque d’effondrement. La seule alternative qui s’offre à moi est la suivante : soit je fais le détour par la route principale via Les Planches en Montagne pour rejoindre le village de Syam par la vallée de la Saine en rive droite ; ce qui allonge mon parcours d’environ 7 km mais qui offre aussi bien plus de certitude sur le fait d’atteindre l’objectif, soit je poursuis ma route comme prévu au risque de ne pouvoir passer et de devoir rebrousser chemin m’obligeant ainsi à remonter tout ce que j’aurai descendu auparavant pour finalement se rabattre sur la première option… Quel dilemme !
Allez, je tente le coup et m’en tient au parcours choisi initialement. On verra bien ce qu’il adviendra ! Je me lance dans la descente, passe le hameau des Combes et arrive en fond de vallée. Jusqu’à là, tout va encore bien mais après avoir parcouru près de 3,5 km, me voici bloqué devant de solides barrières en bois en travers de la route. A partir d’ici, l’accès est impossible à toute voiture et cela doit faire déjà longtemps car la chaussée a pratiquement disparu sous les jeunes arbres, les arbustes et autres plantes herbacées en tout genre sur près de 500 m. Je comprends mieux maintenant le sens du panneau au tout début de la descente : à cet endroit, la vallée est à son point le plus étroit et la route serpente au pied de falaises rocheuses, parfois en surplomb. Mais la présence d’une étroite bande de revêtement encore intact semble montrer que le passage est encore possible à pied ou à vélo. La paroi rocheuse juste au-dessus de ma tête est effectivement impressionnante. Le risque de chute de pierre doit être bien plus grand par forte pluie ou lors des périodes de gel et dégel mais aujourd’hui, je n’entends pas le moindre caillou qui tombe alors je poursuis prudemment ma route, dans le plus grand silence et bien content d’avoir le casque sur la tête. Le passage se fait sans aucune difficulté jusqu’à l’autre barrière avant de retrouver une route au gabarit classique.
Peu de temps après, j’y croise un groupe de randonneurs pédestres et même un cyclo en plein voyage au vu des lourdes sacoches que porte son vélo. Lui aussi est venu de perdre sur cette route à la tranquillité absolue ! A la sortie du massif forestier, la vallée s’élargit subitement et après quelques hectomètres, me voici au village de Syam et à la Villa Paladienne du XIXe siècle, bien cachée derrière son mur d’enceinte et un épais rideau d’arbres mais dont on peut quand même apercevoir le superbe édifice par une mince trouée. Je reprends ma route en remontant désormais la vallée de l’Ain jusqu’au hameau des Forges, au site de la perte de l’Ain.
C’est dans une gorge très étroite que disparaît la rivière sur une quinzaine de mètres avant de rejaillir dans de grandes vasques. Je profite de la beauté du site pour faire une courte pause à l’ombre de la haie de tilleuls. Avec une chaleur étouffante en fond de vallée, ces quelques instants de repos sont bien agréables mais il me faut reprendre la route en direction de Bourg de Sirop. A un moment ou à un autre, il va falloir ressortir du «trou» pour regagner Longcochon et le moment est venu.
Dès la reprise, un petit raidard (le dernier de la journée) bien ombragé m’attend avant une longue montée jusqu’au tunnel emprunté le matin même dans l’autre sens pour rejoindre Champagnole. Après quoi, c’est le retour des montagnes russes jusqu’à l’auberge du Sillet, à travers la campagne jurassienne et le village répondant au charmant nom de «Billecul». Il semble que ce nom soit lié à la présence d’une ancienne mare, au niveau de l’actuelle mairie, où des canards avaient l’habitude de plonger la tête en billant du cul, selon l’expression de l’époque.
Ouf, il est plus de 18h30 et me voici de retour au bercail, fatigué mais heureux de cette superbe balade à la découverte du pays des lacs. Le temps de se désaltérer un peu et je me dépêche de prendre ma douche pour ne pas arriver en retard au diner. Au menu du soir, une salade comtoise (avec du jambon et du Comté), une côte de porc comtoise (avec une tranche de jambon et une sauce au vin et au Comté), une mousse au chocolat et, pour faire passer le tout, une délicieuse liqueur de sapin ! Et après ça, il ne manque qu'une bonne nuit de sommeil réparatrice pour être en pleine forme demain matin.
Aujourd’hui, c’est la dernière balade de mon séjour dans le Jura. En après-midi, je pars en voiture pour rejoindre des amis pour le week-end du coté de Metz. Mais en attendant, j’ai encore quelques heures devant moi pour en profiter pleinement d’autant plus que le beau temps est toujours au rendez-vous, avec la chaleur qui commence déjà à se faire sentir dès le matin. Je me suis levé un peu plus tôt que les jours précédents pour boucler ma valise et la charger dans la voiture, historie de partir à vélo vers 8h30 au plus tard. Après le petit-déjeuner, je récupère mon pique-nique que je glisse dans la sacoche arrière, sans oublier les deux bidons remplis à ras bord et une grande bouteille d’eau très fraîche qui s’avère indispensable vu la température annoncée.
Pour cette ultime balade, je mets le cap au nord en direction de Pontarlier. Les tous premiers kilomètres vers Essavilly semblent désormais presque familiers mais après, c’est l’aventure ! Arrivé à Mignovillard, je vire sur ma droite et la route commence à s’élever avec un beau faux-plat puis, plus franchement en arrivant dans la forêt avec des pentes de 6 à 7,5 % sur 3 km avant d’arriver au chalet de la Bourre. Je crois être arriver au sommet mais non, la route descend sur moins d’un kilomètre avant de remonter pour parvenir enfin au col du Lancier, à 1 075 m d’altitude. Malgré les kilomètres avalés les jours précédents et la fatigue qui se fait sentir, l’ascension sur cette petite route forestière est un vrai régal. Au vu du profil du parcours, cette première cote est celle qui présente les pentes les plus fortes et c’est aussi le point haut de la balade. Je pourrai penser que le plus dur est passé mais cela serait une erreur de le croire…
Après une courte pause au col, je me laisser glisser dans la descente très douce (50 m de dénivelée en 3 km) jusqu’à la RD 46 que je prends en direction du village de Remoray. Les belles forêts de conifères laissent maintenant place aux vertes prairies dont la plupart ont été récemment fauchées. Sur ma gauche, un troupeau de Montbéliardes paît en toute tranquillité.
Me voici arrivé au lac de Remoray que la route surplombe légèrement en offrant de superbes vues sur la réserve naturelle nationale. Un peu plus loin, la rivière «le Doubs» fait son apparition au milieu des roselières avant de disparaître dans le lac de Saint-Point que je longe sur quelques kilomètres jusqu’à Port Titi. J’y retrouve le Doubs qui se faufile à travers les roseaux jusqu’au village d’Oye et Pallet où je m’arrête pour un ravitaillement au bord du ruisseau du Saut. Il n’est que 10h30 mais en plein soleil, la chaleur est déjà difficile à supporter alors la moindre zone ombragée est plus que précieuse !
Avant de reprendre ma route, je jette un œil à la carte et au GPS car les choses vont se gâter rapidement avec 5 km d’ascension pour rejoindre les bois de Ban qui dominent la vallée du Doubs. Cela commence avec la cote dans le village pour bifurquer ensuite sur la droite juste avant le hameau de Friard. Avec une pente moyenne de 6,5 %, c’est le kilomètre le plus pentu de cette côte. Bon, j’ai affronté des pentes nettement plus fortes depuis le début de la semaine et ça ne devrait pas être un problème théoriquement. Mais, en réalité, ça l’est ! La route telle que figurant sur la carte IGN, n’en est plus une. Son revêtement est fortement détérioré et s’avère être un savoureux mélange de morceau de bitume et de gros cailloux dans lesquels les eaux de pluie creusent des ravines. Ajouter à cela la forte pente et les petits braquets (pas assez à mon goût) sont les bienvenus.
C’est dans cette partie coriace que me dépassent sans aucun effort apparent deux personnes sur des vélos à assistance électrique. Y’a pas photo entre eux et moi ! Parfois, on aimerait bien avoir un moteur… Après quelques minutes de souffrance, j’arrive à la Grange Carrée, où la pente se calme momentanément. C’est maintenant un vrai chemin que j’emprunte en direction de la Combe à Point où je suis obligé de m’arrêter. L’étroit chemin est bloqué par un tracteur agricole en panne sur lequel s’affairent trois personnes mais la réparation de l’une des roues semble bien difficile avec le manque de place. Il me faut descendre de vélo et passer à pied dans le bois pour les contourner avant d’arriver enfin à la route du village des Granges dessus où je tourne sur ma droite pour me diriger vers les bois de Ban. Après 1,5 km sur cette route, me voici à nouveau sur un chemin forestier dont l’état laisse à désirer une nouvelle fois. De récents travaux forestiers ont été réalisés dans les parcelles voisines au vu des nombreuses grumes stockées par endroit et une niveleuse a essayé d’arranger un peu le chemin mais sans trop de réussite manifestement.
Avec tout ça, la progression est très lente mais chaque mètre parcouru me rapproche du principal objectif de la journée : le point de vue sur la vallée de la Joux et le château de Joux ; nous étions passé à son pied lors de notre voyage à vélo autour du massif du Jura entre France et Suisse. Mais je ne suis pas au bout de mes efforts. Pour rejoindre le belvédère, il faut quitter le chemin principal pour descendre d’une quarantaine de mètres. J’hésite un peu d’autant plus qu’un autre panorama se trouve un peu plus loin et semble plus facilement accessible et je finis par me lancer quand même dans cette descente, presque toujours debout sur les freins pour ne pas risquer la chute avec toutes les branches mortes jonchées sur le sol et les nombreux cailloux. Tout le mal que je me donne est récompensé : le point de vue sur la rivière et les forts de Joux et de Larmont est vraiment magnifique.
Après une pause pleinement méritée, il faut maintenant remonter tout ce que j’ai descendu… J’essaie en remontant sur le vélo mais après à peine une dizaine de mètres, il me faut mettre pied à terre. La pente trop raide et les feuilles font patiner ma roue arrière et comme je suis déjà sur le plus petit braquet, il n’y a aucune alternative : c’est l’arrêt obligatoire et il faut pousser le vélo. Une fois ce passage trop difficile passé, j’enfourche à nouveau mon vélo pour une seconde tentative. Cette fois, ça passe et c’est reparti jusqu’au sommet et ce chemin trop défoncé qui m’amène au second belvédère. D’accès facile, il s’avère toutefois très très décevant. C’est à peine si l’on distingue le château de Joux à travers les branchages et dans quelques années, il est probable que le panorama sera complètement bouché. Je suis bien content de m’être persuader d’aller au premier ! Malgré ça, il y a quand même une bonne nouvelle : les chemins forestiers, c’est fini. Désormais, ce n’est rien que des routes jusqu’à l’arrivée. Ouf !
Après deux kilomètres sur la route forestière, j’arrive à la chapelle de l’Espérance. De la table d’orientation, on domine toute la ville de Pontarlier et le point de vue sur le massif du Grand Taureau est très chouette. Le compteur affiche 46 km et il n’est pas encore midi moins le quart mais le site est idéal pour le pique-nique, à l’ombre de la chapelle, surtout que les batteries sont presque vides. Il est temps de les recharger avec les casse-croûtes au jambon et au Comté, les chips, l’œuf dur et les fruits que j’englouti rapidement tout en profitant de la vue sur la ville et les alentours.
Peu de temps après midi, je me décide à reprendre la route afin de pouvoir profiter des paysages que les trente derniers kilomètres ne manqueront pas de m’offrir. La descente sur Pontarlier est très rapide et je dois être attentif aux indications que me donne le GPS pour éviter les grands axes de circulation, en suivant de petites routes. Mais le trafic est dense à l’heure de la pause méridienne sur la RD 47 en direction de Bonnevaux, dans la vallée du Drugeon et ces quelques kilomètres jusqu’à Granges-Narboz ne sont pas très agréables. Par chance, à la sortie du village, la circulation se calme un peu et le gabarit de la chaussée se réduit ; ce qui permet de retrouver un peu plus de sérénité. Cela me laisse plus de temps pour essayer d’apercevoir la rivière mais rien n’y fait, elle reste désespérément cachée parmi les nombreuses tourbières.
Sur cette partie du parcours, aucune forêt ni même d’alignement d’arbres en bord de route pour offrir un peu d’ombre alors je commence à cuire sous un soleil de plus en plus brulant. A La Rivière Drugeon, je ne manque surtout pas les tables de pique-nique installées à l’ombre, au bord de l’étang, pour une courte pause rafraichissante. La réserve d’eau commence à baisser sérieusement mais cela devrait quand même tenir jusqu’à l’arrivée. Ce n’est qu’après le village de Bouverans que la route se rapproche du pied de la montagne du Laveron où la forêt réapparait, et avec la forêt, l’ombre salvatrice.
A hauteur de la Chapelle du Lac, je marque une hésitation : ai-je le temps de découvrir les berges du lac de l’Entonnoir ou non ? Il n’est pas encore 13h00 et il me reste à parcourir une quinzaine de kilomètres quasi plat seulement donc je devrais arriver à l’auberge avant 14h00 comme prévu initialement alors je n’hésite pas longtemps à prendre le chemin qui borde la rive nord-est du lac. Les deux caillebotis en bois, les observatoires et les nombreux panneaux d’information sur la faune et la flore du lac qui y ont été aménagé permettent de découvrir toute la beauté du site, dans une quiétude absolue étant donné que j’y suis absolument seul. Ce lac de 74 hectares présente une particularité vraiment étonnante : lorsque les précipitations ne sont pas assez importantes, il se vide presque totalement en quelques semaines voire quelques jours en raison de pertes dans le sol karstique qui communiquent avec une rivière souterraine. Cela s’est produit notamment en 2018 et 2017 à l’approche de l’automne. Par chance pour moi, en ce début d’été, le niveau est au plus haut.
Après cette courte escapade non prévue au programme, je reprends ma route mais pas pour longtemps. Sur ma droite, c’est le départ du sentier qui mène au belvédère du Marais du Varot et du Lac. Je regarde l’heure sur le GSP, il n’est guère plus de 13h00 alors je décide d’y aller. Le sentier étant par moment trop étroit pour y rouler en sécurité, je pousse le vélo sur 150 m avant d’y arriver. La vue sur les tourbières du lac est vraiment magnifique. Il est quand même grand temps de reprendre maintenant la route si je veux avoir un peu de temps pour souffler une fois arrivé à l’auberge avant de repartir en voiture cette fois. Au village de Bonenvaux, je fais un dernier arrêt à la fontaine avant de prendre sur 2,5 km la route d’Arbois au trafic assez dense, puis je tourne sur ma gauche vers Mignovillard où je retrouve la route empruntée le matin même, en sens inverse évidemment.
Il ne me reste plus que cinq kilomètres pour rejoindre Longcochon, les cinq derniers kilomètres de mon séjour dans le haut Jura alors je pédale mollement en laissant glisser le vélo dans le moindre faux-plat descendant en me remémorant les bons moments passés dans cette très belle région et l’accueil chaleureux reçu à l’auberge du Sillet. Il n’est pas encore 14h00 lorsque j’y arrive. Après avoir chargé le vélo dans la voiture, je récupère ma bouteille d’eau dans le réfrigérateur, m’installe une dernière fois à l’ombre du tilleul pour me reposer avant le départ. La mélancolie se fait un peu sentir car c’est la fin des vacances dans le Jura mais les bons souvenirs reprennent vite le dessus tout comme l’envie de revenir ici pour partir découvrir les régions d’Arbois, de Poligny, de Baume les Messieurs, de Salins les Bains ou de Morez sans oublier de retourner dans la vallée de Joux mais par beau temps ce coup-ci.
En attendant, direction Metz pour le week-end et quelques coups de pédale le long de la Moselle !
© les balades à vélo de Pierrot - récit en date du .
N'hésitez pas à découvrir les 4 albums photographiques (76 photos) illustrant ce récit dans la photothèque accessible directement en cliquant ici.
Vous pouvez aussi consulter les cartes de ces balades dans la rubrique «les beaux voyages» de la cartothèque via le menu «la médiathèque» ou directement en cliquant ici.